C’était supposément être un jour calme. Supposément. Junho était vacant à ses tâches de Lieutenant au sein du palais. Il s’y était habitué à travailler ici, bien qu’au début, c’était oppressant pour lui. Sa nervosité ou son stress pouvait être vu comme étant normal, mais de son point de vue il en était tout autre. Il n’était pas censé être là, c’était interdit, mais comme sa situation était secrète, il en avait profité et le voilà aujourd’hui Lieutenant auprès d’une famille, sa supposée famille qui ne connaissait même pas son existence, sa vraie identité. Plongé dans ses pensées, le jeune homme sort de son état léthargique quand un brigadier vient en panique le prévenir d’une affaire urgente. Le prince Maeum s’était encore fait la malle en dehors du palais. D’habitude, c’était son collègue Eden qui s’en chargeait, mais il semblait qu’il n’était pas là. Junho se leva de sa chaise avant de se changer en vitesse, troquant son uniforme rouge et or pour un costume noir simple et sortir du palais et partir à la recherche de ce prince rebelle qui n’en faisait qu’à sa tête. Oh, Junho le connaissait assez bien pour connaître ses points de prédilections, et en soi, ce n’était pas vraiment son problème. Non, il était ailleurs le problème. Depuis l’attentat, c’était infernal de devoir répéter sans cesse à Maeum de ne pas sortir sans gardes, ni escouades pour le protéger. Qui sait ce qu’il pouvait lui arriver au delà de ces murs ? Un fou furieux, un révolutionnaire extrême…n’importe qui pouvait s’en prendre à lui.

Se dépêchant de rejoindre Hanseong, Junho ne prend pas la peine de chercher loin. La voiture de fonction à toute vitesse, le Lieutenant se gare en trombe dans une rue déserte et part en courant vers la place centrale. Junho espérait de tout coeur que le Prince y serait et que la situation serait vite réglée. Surtout que Maeum n’essayerait pas de l’embobiner pour continuer sa promenade.

Arrivant aux abords de la place, le Lieutenant observe les environs, scrute les passants, les bancs pour apercevoir plus loin le Prince. Soulagé en premiers lieux, Junho lâche un soupire et s’avance vers lui.

« Il est temps de rentrer. » clama Junho d’un ton calme bien que ferme en se postant bien devant le rebel devant ses yeux.

Il savait que le Prince allait au début le vanner, essayer de détendre l’atmosphère, mais Junho n’était pas d’humeur pour ce jeu. Pas aujourd’hui. Déjà stressé, privé de sommeil due à sa garde nocturne de la veille, Junho était loin de s’imaginer ce qui allait se passer dans un futur imminent.

« Écoute. Je sais que c’est dur pour toi d’écouter parfois, mais ce n’est vraiment pas le moment d’en faire qu’à sa tête ! Dois-je te rappeler ce qu’il s’est passé récemment ? »

Inutile de rappeler ce qu’il s’était passé quelques jours auparavant. Un acte emprunt de violence qui mettait en péril les membres de la famille royale. Même si Maeum n’était pas de la branche principale, il n’en restait pas moins un membre de la monarchie, ce qui le plaçait comme une cible idéale. Oh, on pourrait le qualifier de paranoïaque, mais la sécurité de Maeum était devenue une priorité à l’instant.

Le plus âgé scruta les yeux de son protégé du moment avant de soupirer et de lui faire signe de se lever. Pendant ce temps là, il eu le temps d’entendre des pas précipités foncer droit sur eux ! D’un geste rapide, Junho se mit entre le Prince et l’individu, un bras incitant à mettre Maeum derrière lui, l’autre faisant bloc contre l’assaillant.
L’odeur infecte de l’alcool et du tabac froid le submergent. Un visage sale, des yeux injectés de sang, des paroles confuses mais qui trahissaient la violence et l’insurrection…Et merde…Voilà ce qu’avait redouté le lieutenant en sortant du palais. Bien que l’intrus semblait y mettre de la force, vu sa consommation d’alcool, Junho en avait déduit qu’il s’agissait d’une personne sous l’emprise d’alcool. C’est donc sans hésiter que le Lieutenant le repoussa pour le plaquer contre le sol, capturant ses poignets pour l’immobiliser. Au début, Junho pensait s'en sortir, mais le bougre avait plus de force et bientôt, le Lieutenant du user de sa force tactique pour définitivement le mettre hors de cause. Il sentait l'adrénaline posséder son corps, son regard alerte et surtout, l'inquiétude qu'il n'arrive malheur à Maeum. Et pourtant, un mouvement de taekwondo suffit à le mettre au sol. L’homme hurle, prononce des mots injurieux, la moitié restant tout de même incompréhensible. L’agitation ayant alerté les personnes alentours, une brigade de police s’était empressée d’intervenir. Le forcené fut bientôt pris en charge, mais Junho voulait éviter que le Prince soit vu et donc il se dépêcha de dire aux policiers qu’il était de la Brigade royale afin d’éviter tout autre problèmes et d’emmener Maeum vers la voiture en le protégeant de sa veste.

Quitter le palais à cette période était déconseillé, encore moins de le faire sans garde alors qu’un attentat avait eu lieu le mois dernier, visant le roi actuel. Maeum avait eu le droit à cette morale plus d’une fois ces dernières semaines, non pas parce qu’il était encore une fois sorti tout seul, mais parce qu’on préférait le prévenir avant qu’il ne tente quoi que ce soit. Il comprenait l’inquiétude de son entourage, il était même le premier à se faire du souci pour ses proches et à leur demander de faire plus attention, d’appeler au moindre problème, et c’était le pourquoi également il avait été plus raisonnable dans ses escapades. Il avait beau être téméraire, un petit peu rebelle dans l’âme, il n’était pas fou non plus donc à chaque fois qu’il avait dû partir en extérieur, il n’avait pas rechigné des gardes qui l’accompagnaient. Certes, évidemment, le prince n’avait guère pu s’empêcher de râler dans sa tête, de plaindre son statut puis d’en souffler mentalement néanmoins ce n’était pas comme si on lui avait laissé le choix. Ces derniers temps, il avait ressenti cette désagréable impression d’être encore plus surveillé que de raison et non pas uniquement parce qu’il était ce prince qui avait tendance à préférer les balades nocturnes en solitaire. Alors oui, Maeum avait respecté ce qu’on lui demandait, il s’était rendu à l’hôpital ou à l’université accompagné d’Eden, sans jamais disparaître vraiment de sa vision. Et si par le plus grand des hasards il l’avait fait, ça n’avait pas été intentionnel. Pour une fois.

Hors, des jours s’étaient écoulés depuis et sa liberté lui manquait ; il passait énormément de temps sur son lieu de travail, le stress, la pression, l’empêchait d’être cent pourcents sereins quand il rentrait chez lui le soir. Le prince prenait sur lui, allongé sur son lit le plus souvent, à observer le plafond ou en écoutant la musique, cependant ce n’était jamais suffisant. Il avait envie d’air frais, de liberté, de nature également et ce n’était qu’après avoir pesé le pour et le contre, qu’il s’était motivé à sortir en douce ce soir là. Maeum n’avait pas besoin d’être déjà dehors pour deviner les réprimandes qu’on lui ferait une fois retrouvé ; il entendait déjà les leçons d’Eden à des kilomètres seulement ça tombait bien, Eden était absent aujourd’hui. Ce qui ne l’empêcherait pas de lui faire la morale un autre jour, certes. Le jeune homme aurait pu demander à quelqu’un de l’accompagner, oui, seulement il ne le voulait pas. Il avait envie de se retrouver avec lui-même puis si quelque chose devait lui arriver, c’était simplement que son tour était venu. Certains diraient qu’il était trop pessimiste et insouciant, lui dirait qu’il était juste rationnel. Même s’il souhaitait vivre le plus longtemps possible, il n’avait pas spécialement peur de mourir.

Enfin dans le centre de la ville de Hanseong, Maeum s’était éloigné des endroits plein de foule et avait commencé à se promener, une casquette sur la tête et les mains dans les poches. Au bout du compte, c’était dans un parc qu’il avait choisi de s’arrêter puis de s’installer sur un banc vide, son regard observant les différentes personnes près de lui. Il n’y avait pas beaucoup de monde à cette heure de la soirée néanmoins il y en avait assez pour attirer son attention et même pour lui étirer une esquisse au bord des lèvres parfois. Parce qu’il y avait certaines scènes qui étaient particulièrement touchantes, qui lui rappelaient que l’univers n’était pas rempli que de fous et que juste pour ça, la vie valait réellement la peine d’être vécue. Le prince ne savait pas combien de temps exactement il était resté assis sur ce banc à observer les alentours et à se perdre dans diverses réflexions hors, comme toujours, la réalité avait fini par le rattraper. Si ce n’était pas son garde du corps habituel qui s’était présenté devant ses yeux, il s’agissait d’un jeune homme que Maeum connaissait plutôt bien malgré tout. En silence tout d’abord, il avait noyé son regard dans le sien, ne cherchant pas à relever ses paroles alors que son interlocuteur lui ordonnait de rentrer. Non, il n’était pas enchanté à cette idée cependant il savait aussi qu’il n’en avait pas trop le choix. « Ce n’est pas la peine, ça ira. Je connais déjà la leçon par cœur. » Un haussement d’épaule, c’était tout ce que le prince lui avait adressé alors qu’il se relevait, prêt à partir. Chose qu’ils ne purent pas faire immédiatement à cause d’un homme mal intentionné qui s’était précipité en leur direction, Jun Ho se plaçant aussitôt devant lui avant de se débrouiller pour s’occuper de l’inconnu. N’importe qui à sa place aurait été impressionné par cet acte de bravoure toutefois ce n’était pas le cas de Maeum qui ne pouvait que souffler intérieurement à cause de cette comédie. Il était le prince, il fallait automatiquement le protéger cependant c’était toujours ce qui l’agaçait le plus ; évidemment que non, il n’en voulait pas au garde d’agir de la sorte, ce dernier ne faisait que son travail néanmoins c’était frustrant d’être considéré comme une petite chose fragile qui n’était pas en mesure de se défendre. Il ne disait pas être invincible ou de toujours parvenir à gérer une situation cependant avant d’être prince, il était un être-humain comme un autre, et qu’est-ce qu’il rêverait d’être considéré comme tel.

En toute honnêteté, par pur esprit de contradiction et de rébellion aussi, le jeune homme avait sérieusement pensé profiter de l’agitation pour prendre la fuite de plus bel, toutefois il n’en avait rien fait. Parce qu’il savait que ce comportement était puéril et qu’il y avait des limites à ne pas franchir, parce que c’était simplement sa frustration qui parlait, mais aussi parce que, malgré tout, il ne voulait pas abuser. Jun Ho venait de se battre pour lui, et il continuerait de le faire à l’avenir si une occasion se présentait à nouveau, il aurait pu se blesser par sa faute donc non, Maeum ne souhaitait pas exagérer. Sans rien dire, il l’avait laissé gérer l’homme sans intervenir, ayant conscience que s’il s’était mêlé, il l’aurait certainement plus gêné qu’autre chose, puis les forces de l’ordre n’avaient pas tardé à arriver. Lorsque son garde du soir avait cherché à le dissimuler de sa veste, aussi désagréable que cela puisse être, le garçon n’avait pas résisté à le repousser vivement. S’il connaissait ses propres limites à ne pas dépasser, il y avait également des limites qu’il n’aimait pas qu’on dépasse. Bien sûr, Maeum était quelqu’un de discret, il n’appréciait pas particulièrement attirer le centre de l’attention hors il détestait l’idée qu’on puisse le penser vouloir se cacher des regards d’autrui. Si des gens le reconnaissaient, qu’est-ce que ça faisait ? Puis surtout, selon lui, un tel geste n’attiserait que plus d’intérêt sur sa personne. « Je te suis, mais je n’ai pas besoin de ça. » Avait-il ajouté calmement mais de son ton neutre habituel. Jun Ho le connaissait, le prince n’était pas un garçon mauvais, il avait son petit caractère néanmoins il le respectait tout comme il respectait son travail, donc il espérait à son tour que le jeune homme puisse le comprendre.

Il est vrai que tout s’était passé vite, mais quand bien même ils étaient maintenant seuls, Junho ne peut s’empêcher de fusiller du regard le royal déserteur. Il avait bien envie de lui hurler dessus, lui faire comprendre que la journée ne pouvait pas être pire et que c’était bien de sa faute si là son stress allait exploser, mais il se retint, sa mâchoire se crispant alors qu’il reprend sa veste sans un mot. Maintenant se posait la question de savoir la suite…Evidemment il devait faire un rapport d’incident, car même si l’individu n’avait pas réussi à atteindre le Prince, c’était tout de même un incident non négligeable aux vues de l’attentat dernier. Et Maeum aurait beau supplier Junho de ne pas le faire, cette fois-ci il ne l’écouterait pas.
Il déverrouilla la voiture pour s’y installer et attendre que Maeum fasse de même, direction le palais. Le regard fatigué, mais alerte, Junho ne se rendit même pas compte qu’il avait mal. Il faut dire avec l’adrénaline, les blessures aux mains qu’il avait récupéré lors de l’altercation n’avaient même pas provoqué de douleur, mais lorsque sa main tourna le volant, il pu voir les éraflures et autres blessures superficielles, qui cependant donnaient peine à voir. Evidemment, Junho préférait que ça soit lui qui prenne que Maeum. Dieu sait ce qu’il se serait passé s’il n’avait pas été là ? Oh, non qu’il ne doute des capacités du Prince pour se défendre, mais la situation aurait vite dégénérée et…la presse ne manquerait pas encore de s’en mêler etc…

Toujours en silence, Junho conduisait. Si Maeum essayerait de détendre l’atmosphère, il n’était pas sûr de pouvoir y adhérer. Mais si le Lieutenant ne pipait mot, c’est qu’il savait que ce dernier connaissait déjà les paroles, et de ce fait, il ne voulait pas lui refaire une morale bien plus salée que l’accoutumée. Mais Junho espérait tout de même que le prince se rendait compte de la gravité de ce qu’il venait de se passer. Pour lui, peut-être qu’il aurait très bien pu se le faire, sans soucis, mais le problème venait d’ailleurs, un mélange toxic de responsabilités, images et devoirs dont Maeum subissait sûrement les conséquences, mais c’était ainsi et Junho ne pouvait qu’essayer de lui faciliter la vie quand il le pouvait. Mais cette fois, c’était impossible.

Une fois les grilles du palais franchies, le Lieutenant se gara pour ensuite sortir et regarda enfin Maeum. « Je doute que tu aies besoin d’aller à l’infirmerie, ni que je te raccompagne à ta chambre comme un bébé. » et de toute façons, Junho doutait sincèrement que le prince essaye encore une fois de fuir après ce qu’il venait de se passer. Las, Junho verrouilla la voiture pour aller prévenir ses collègues que Maeum était de retour, sain et sauf. Il sentit tout de même des fourmillements au bout de ses doigts meurtris et secoua sa main en s’arrêtant en chemin. Par contre, lui devrait sûrement passer à l’infirmerie…

Finalement installé dans la voiture, loin des regards, seul avec son garde du corps du soir, il n’y avait que le silence qui résidait au sein du véhicule. Le prince n’avait rien à dire, il n’était pas spécialement d’humeur à plaisanter et il avait, de toute manière, bien remarqué que ce n’était pas le moment pour ça. Aussi égoïste que cela pouvait être, il avait conscience du travail qu’il leur donnait à chaque fois, du comment il les dérangeait pour qu’on vienne le chercher hors, ça ne l’empêchait jamais de recommencer. Parce qu’il était avide de liberté et de tranquillité, parce que lui ne demandait pas à être protégé et qu’il souhaitait juste pouvoir être lui-même. C’était frustrant, oppressant, et il estimait qu’on ne pouvait pas lui en vouloir d’avoir envie de se retrouver seul. Parfois, il ne cherchait même pas à quitter le palais, il les semait simplement pour fuir cette sensation de surveillance et juste se détendre de son côté. Combien de fois l’avait-on retrouvé dans un petit coin des jardins de la résidence royale lorsqu’il était plus jeune ? Maeum avait cessé de les compter et cette mauvaise habitude ne s’était pas dissipée. Au grand damne de ses gardes du corps. Bien sûr, il comprenait que Jun Ho soit tout autant frustrant que lui, qu’il soit en colère parce que le prince avait encore agi en irresponsable cependant lui en avait assez d’être considéré comme un enfant. Cela valait également pour ce sale type qui avait surgi sur lui, totalement ivre. Il aurait probablement pu le maîtriser tout seul, ce n’était pas pour rien si on lui avait enseigné les arts depuis son plus jeune âge toutefois, il fallait toujours qu’un garde le protège tel un chevalier servant. Il détestait cette image, c’était plus fort que lui. Et pourtant, oui, pourtant, il respectait sincèrement le travail de ces hommes ; il respectait leur honneur, leur bravoure. Ce n’étaient pas à eux qu’il en voulait mais à son statut de prince qui l’empêchait de se comporter comme il le souhaiterait. Nombreux étaient ceux, dans la famille, qui songeaient différemment de lui et qui n’avaient que pour objectif le trône, hors ce n’était pas son cas. Il était fier d’être un Khan juste parce qu’il avait été correctement élevé, parce qu’il n’avait jamais manqué d’amour et que sa mère était une femme admirable. Seulement ce nom était lourd à porter et personne n’était dans sa tête pour deviner tout ce qu’il pensait, pour comprendre pourquoi il fuyait toujours autant de la sorte, et le genre de tourments qui occupaient sans arrêt son esprit.

Un soupir avait traversé ses lèvres alors que son regard était rivé sur le paysage qui défilait à travers la fenêtre, perdu dans diverses réflexions. Toutefois, lorsque ses yeux s’étaient motivés à se poser autre part, c’était la surprise qui avait envahi son cœur en notant les blessures sur les mains du conducteur. Voilà une raison supplémentaire pour laquelle il détestait être prince, et encore plus être protégé ; il n’avait pas envie que l’on se blesse pour lui, il n’avait pas envie non plus que l’on se sacrifie pour son propre bien. Certes, oui, s’il arrêtait de s’échapper comme il le faisait, il ne mettrait pas en danger les autres néanmoins il étoufferait s’il était privé de sa liberté… Il voulait que ses gardes profitent de leur côté pendant que lui profitait de sa tranquillité. Il refusait qu’on se mette en danger pour sa personne, il ne méritait pas tant, et une part de lui en était agacée.

Pas un mot n’avait été prononcé durant le trajet, seul le silence avait été leur compagnie et ils étaient finalement arrivés au palais. Maeum l’avait écouté sans broncher, sans parler, et même sans bouger non plus, il l’avait observé du regard. En effet, non, lui n’avait pas besoin de se rendre à l’infirmerie, et il n’avait pas besoin d’être raccompagné jusqu’à sa chambre. Il l’avait cependant suivi discrètement, en silence, et lorsque Jun Ho eut terminé de discuter, il s’était alors approché de lui. « Suis-moi. » Le prince ne lui laissait même pas l’opportunité de refuser, c’était un ordre. La preuve étant que, sans attendre une once de réponse, il lui avait attrapé délicatement le poignet avant de le tirer, l’emmenant directement dans ses appartements. Il aurait pu l’emmener à l’infirmerie toutefois il préférait se charger de son cas lui-même, il lui devait bien ça. Si jamais le garçon essayait de riposter, Maeum n’hésiterait pas à user de sa poigne pour l’en empêcher. Et voilà comment, en quelques minutes seulement, ils étaient arrivés à sa chambre et le garde du corps avait été forcé de s’installer sur le bord du lit pendant que lui était parti chercher ses accessoires de médecine. Une fois fait, il avait approché une chaise sur laquelle il s’était assis avant de sortir le nécessaire puis de, sans lui demander son avis, commencer à nettoyer les plaies présentes sur ses mains. Soufflant doucement, coupable malgré lui, il n’avait pas voulu redresser ses iris en direction de son vis-à-vis, concentré sur la tâche qu’il entreprenait. « Tu n’as jamais pensé à changer de métier ? » L’avait-il interrogé sérieusement mais avec calme malgré tout, ajoutant aussitôt sans lui avoir donné le temps de répondre « Je ne comprends pas pourquoi sacrifier sa vie pour celle d’un autre. » Non, il ne comprenait réellement pas pourquoi on se démenait autant pour le protéger hors, probablement que dans le fond, oui, il savait. Parce qu’il savait que si les rôles étaient inversés, il ne serait pas capable de rester impassible devant une personne en danger cependant il partait du principe que c’était différent. Il n’avait pas voué sa vie pour quelqu’un, il n’en faisait pas son métier et surtout, il pensait qu’il y avait de bien meilleure personne à protéger que la sienne.

Quand le lieutenant pensait enfin être seul, il allait se diriger vers l’infirmerie, quelqu’un lui attrapa le poignet pour le tirer vers un endroit. Heureusement qu’il n’avait pas eu de mauvais réflexes de le prendre en retour et le faire valser dans un mur le plus proche, car il s’agissait de Maeum…Encore. N’était-il pas supposé être retourné dans sa chambre ? Malgré tout, Junho n’a pas le temps de broncher qu’il était déjà dans la chambre du Prince, assis sur une chaise. Ainsi donc, il avait droit à être traité par le prince lui-même ? Quel honneur pensa-t-il avec ironie avant de soupirer et d’abandonner l’idée de lui faire entendre raison. Quelle tête de mule. Il l’observe faire, grimaçant parfois lorsque le produit désinfectant agit sur ses petites plaies. Puis il y a une question. Pensé à changer de métier ? Le lieutenant l’écoute puis détourne le regard, plongeant dans ses pensées. S’il savait la vérité.

« Je ne fais pas ça pour les autres. Je reste un humain comme les autres, j’ai mes raisons. Mais je ne sacrifie pas ma vie pour celle d’un autre. Du jour au lendemain je pourrais partir, quitter ce palais et tout le reste, retourner comme étant un simple citoyen, et personne ici ne me regrettera. Mais je ne suis pas encore parti. »

Junho regarde Maeum avec insistance. Si il agissait de manière détachée avec le prince, c’était parce qu’il savait qu’il pouvait dire ce qu’il pensait, mais pas encore tous ses secrets. Après tout, le plus gros était bel et bien enfoui et autant mourir que de le dire aux principaux concernés. Il retire sa main quand il juge que le reste ira puis tend la deuxième pour légèrement ébouriffer les cheveux de Maeum.

« Ne t’en fais pas. C’était un réflexe, je sais que tu peux te défendre, mais c’est aussi mon travail. Mh ? »

Enfin, le lieutenant lui adresse un léger sourire rassurant, se levant afin de prendre congés. Malgré tout, ses pensées sombres remuent dans son esprit. La question que le prince lui avait posé n’arrangeait pas les choses. Se sacrifiait-il vraiment pour les autres ? Pourquoi restait-il ici ? D’un pas sûr, Junho retourne à ses quartiers pour mettre des pansements et bandages sur ses blessures traitées. Ah…Il avait besoin de repos.