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feat. @ri dohyun

Il était évident ces derniers temps que Dohyun n’était pas dans son état normal. Le Lieutenant Ahn l’avait bien remarqué. D’habitude, le brigadier était toujours joyeux, ou du moins se montrait sous son meilleur jour malgré les fois où Junho l’avait repris mainte fois pour ses « moment d’inattention ». Même si Dohyun avait essayé à plusieurs reprises de se rapprocher du Lieutenant via d’invitations -sans ambiguïtés- afin de sortir un peu de cette relation hiérarchique, Junho avait toujours refusé poliment. Non pas qu’il ne voulait pas, mais pour lui c’était une perte de temps. Il ne cherchait pas à se faire des amis ici, et il se doutait que plusieurs personnes ne voulaient pas l’être avec lui également. Néanmoins, Junho était loin d’être un être insensible comme on pouvait bien le croire. Il savait que depuis l’attentat, son subordonné n’était pas au plus haut de sa forme, et ça se ressentait dans ses performances. Jusqu’ici, Junho avait pour habitude de le briefer régulièrement, mais malgré tout, il préféra pour une fois faire le premier pas. Il voulait savoir ce qu’il se passait avec Dohyun. Même s’il ne souhaitait pas que cela se fasse de manière trop formelle, il se résolut à l’emmener à l’extérieur du palais, pour qu’ils discutent dans un cadre qui soit moins stricte, austère. Espérant que Dohyun soit chez lui ce soir là, Junho sortit de la caserne, en civil pour aller vers le logement du brigadier.

Il toqua à la porte, attendant quelques instants pour qu’enfin le visage de Dohyun apparaisse. Clairement ça n’allait pas fort. Il y avait quelque chose en moins dans ses traits qui empêchait Junho de penser que tout tournait rond et renforça son idée qu’au contraire, ça n’allait pas. Le Lieutenant se racle la gorge avant de dire d’un ton calme.

« Habille-toi en civil, tes chaussures et suis-moi. »

La demande pouvait sembler incongrue venant de Junho, peu habitué à faire ce genre de choses, mais son inquiétude pour Dohyun était plus importante que sa gêne. S’il avait omis intentionnellement de dire au brigadier où ils allaient et pour quoi faire, c’était parce qu’il se voyait mal dire « on va aller manger un bout tranquillement ». Après tout, il était celui qui avait refusé un bon nombre de fois. Attendant devant la résidence de Dohyun, Junho observe le quartier calme. Il n’était jamais venu, ou pratiquement peu, dans ce district qui lui restait inaccessible pour le moment. Ses économies l’aidaient pas mal, mais il était loin de pouvoir s’offrir un logement ici. Bien qu’il ne l’admettrait jamais à voix haute, Junho avait imaginé un bon nombre de fois un autre monde « si », s’il était né comme un membre à part entière de cette famille…Comment ça se serait passé ? Il n’en était pas certain, mais les réponses qu’il cherchait n’étaient pas celles de questions hypothétiques. Il était né bâtard illégitime, et non reconnu, et quelque part ça le suffisait dans l’instant présent. Il ne savait pas réellement non plus comment l’avenir se ferait pour lui, mais il espérait qu’elle serait meilleure.

Quand Dohyun était prêt, Junho engagea la marche vers la sortie du palais, pour prendre sa voiture. Oui son propre véhicule et non un véhicule de fonctions. Après tout, ils n’étaient pas censés être en service ce soir, alors inutile de prendre un véhicule du palais. D’un signe de tête, le Lieutenant intima Dohyun à entrer dans la voiture noire, lui-même s’installant à la place conducteur et les conduire jusqu’à sa destination prévue: un restaurant barbecue. Junho avait déjà du mal de rester calme et de ne pas montrer sa gêne, alors que se passait-il dans la tête de Dohyun en cet instant ? Il était bien curieux de le savoir, tout comme le reste de la soirée qui s’annonçait.

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Les yeux perdus au plafond, Dohyun contemplait la lumière stable de la lampe, le corps las. Sans doute était-ce l’état de chaque salarié qui rentrait après une dure journée de travail, parce qu’une journée de huit heures était longue et qu’une fois rentré, il n’y avait plus d’énergie qui restait dans le corps, qui ne demandait qu’à dormir. Dohyun n’avait jamais été quelqu’un comme ça : il débordait toujours d’énergie, parce que justement, son travail ne le fatiguait pas. C’était son rêve depuis gamin de faire partie de la brigade (mais surtout, de protéger la princesse Yeji ; et maintenant qu’il le faisait, il était aux anges). Mais plusieurs problèmes s’ajoutaient à ça : il était tombé amoureux de ladite princesse, ils avaient été fiancés contre leur gré et il n’avait pas été présent pour la protéger lors de l’attentat. La culpabilité le rongeait et il se sentait désolé envers la princesse, lourd sentiment d’échec qui planait au-dessus de lui.

Alors évidemment que ça se ressentait dans ses performances, évidemment que le lieutenant Ahn l’avait remarqué. Il était un idiot pour broyer du noir et ne pas faire son boulot correctement. Justement, il avait déjà fait une erreur en n’ayant pas pu protéger Yeji, pourquoi est-ce qu’il continuait d’en faire ? Il devait se reprendre en main (ce qu’il ignorait, en revanche, c’était que plus il se disait ça, et plus il se mettait de pression, donc plus il faisait d’erreurs).

Quelqu’un toqua à sa porte. Dohyun se redressa et arqua un sourcil. Étrange, il n’attendait personne ce soir. Qui ça pouvait être ? Prudent, il regarda à travers le judas, et fut plus que surpris de constater que c’était son lieutenant qui se trouvait de l’autre côté de la porte. Que lui voulait-il ? Leurs heures de travail étaient terminées, après tout. Si le lieutenant lui-même se montrait au seuil de sa porte, n’était-ce pas forcément mauvais signe ? Le cœur de Dohyun accéléra.

Il ouvrit la porte, les traits confus. Il n’eut pas le temps de prononcer le moindre mot qu’il entendit le lieutenant se racler la porte, et lui prononcer des mots qui pétrifièrent Dohyun. S’habiller en civil et le suivre ? Qu’est-ce qu’il entendait par là ? Est-ce que quelque chose de grave s’était passé et ils devaient investiguer la situation à deux ? Lui confiait-on une mission secrète, à exécuter avec le lieutenant ? Le poids de son poste de garde lui redressa les épaules, et il se tint bien droit, comme s’ils étaient à la caserne et non chez lui. « Oui mon lieutenant ! » Et il s’exécuta pour s’habiller convenablement, juste assez discret pour parfaitement se fondre dans la masse, et revint pour enfiler ses chaussures avant de fermer la porte derrière lui. Il suivit le lieutenant Ahn jusqu’à sa voiture – sa voiture personnelle. Cela mit Dohyun davantage sur ses gardes : la mission était si importante que son lieutenant avait dû prendre sa voiture personnelle. Devaient-ils se fondre autant dans la masse ? C’était inquiétant… Quelle était leur mission, ce soir ? La question brûlait les lèvres de Dohyun, mais il ne put se résoudre à la poser. Il avait l’impression qu’elle ne connaîtrait pas de réponse : et de toute façon, si le lieutenant ne lui disait pas, c’était bien qu’il attendait de lui qu’il devine tout seul la situation. Il devait faire preuve de perspicacité.

En silence, il observa les rues qu’ils empruntaient, remarquant qu’ils s’approchaient plutôt d’un quartier animé. Quelque chose s’était-il passé en centre-ville ? Un autre attentat ? Ou plutôt, une tentative d’attentat ? Étaient-ils lancés en mission pour déjouer l’attentat ? La trachée de Dohyun se bloqua, la pression serrant chaque partie de son corps. Il devait faire du bon travail. Il devait faire de son mieux. Il devait devenir meilleur.

Et puis, ils s’arrêtèrent sur un parking. Le trajet s’était parfaitement déroulé dans le silence (habituel pour Junho, inhabituel pour Dohyun – trop occupé à stresser). Descendant de la voiture, Dohyun jeta des coups d’œil de droite à gauche, toujours prudent. Il suivit le lieutenant le plus normalement possible dans les rues, à l’affût du moindre danger, jusqu’à ce que… jusqu’à ce qu’ils entrent dans un restaurant barbecue. La tentative d’attentat se trouvait ici ? Dohyun plissa des yeux. Il ne voyait rien de suspect, mais son lieutenant lui dirait sûrement de mieux observer : le danger devait forcément être là.

Menés à leur table, Dohyun s’assit, peu à l’aise, l’impression que le danger allait lui sauter à la gorge à n’importe quel moment comme il n’avait toujours pas localisé le danger. Et puis, l’évidence lui sauta aux yeux : bien sûr ! Le lieutenant s’était assis ici car les terroristes étaient à la table d’à côté ! Dohyun les dévisagea du regard (euh… ils avaient l’air… très normaux… ?). S’approchant de Junho, il chuchota : « J’ai bien compris la situation, mon lieutenant. Que devons-nous faire ? »

Non, t’as rien compris, Dohyun.

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feat. @ri dohyun

C’était vraiment une situation très étrange pour ne pas dire comique. Si le Lieutenant faisait les choses en silence car il se sentait très…embarrassé de faire ce genre de choses par lui-même et c’était contraire à son habitude, autant Dohyun ne semblait pas du tout dans la même case que son supérieur. Il voyait bien que le brigadier était attentif, voire sur le qui-vive alors que Junho était certes, nerveux mais largement plus détendu que son cadet. Installé à leur table ronde où le centre était occupé par les braises de charbon, le plus âgé se charge de lui donner baguettes et cuillère alors qu’un sourcil s’arque à la phrase de son cadet. Que devons-nous faire ? De quoi parlait-il ?? Junho regarde le brigadier sans un mot avant de secouer la tête et de soupirer.

« Je ne sais pas à quoi tu penses, mais…euh…Je voulais que l’on parle un peu de ce qu’il se passe ses derniers temps. Je voulais pas non plus te coincer entre deux murs et faire la morale comme je le fais d’habitude, alors je me suis dit que c’était un endroit plus…détendu pour parler. » expliqua-t-il avant de se racler la gorge, et d’appeler un serveur pour passer commande. Pas d’alcool tout de même, car les deux dépendaient de la Brigade et rentrer en étant saouls auraient été intolérable.

Après un autre instant de silence, Junho pose de nouveau ses yeux sur son protégé.

« Bon…Je ne vais pas y passer par quatre chemins. J’ai remarqué que tu étais ailleurs ces derniers temps. Assez pour que tu commettes plus de petites erreurs, mais tu sais que une petite erreur plus une autre deviens une grosse erreur. Et je voudrais éviter cela, alors je te demande ce qu’il ne va pas. » il fait une pause, prend le temps de jauger les réactions de Dohyun et continue sur sa lancée. « Je sais que ce n’est pas facile de se confier, mais je suis ton Lieutenant, et même si je sanctionne beaucoup ou reprends énormément, ça en veut pas dire qu’il ne faut pas me parler pour dire que ça ne va pas. Au contraire… »

Les mots sonnent peut-être maladroitement, ou un peu creux, et pourtant Junho est sincère dans ses propos. Il ne veut pas que Dohyun se sente comme prisonnier de ses doutes ou angoisses à cause de lui et son comportement - on va pas se mentir- de goujat. Certes, il était froid et distant, mais il restait un être humain comme les autres.

Le serveur revient avec la commande et Junho s’occupe dès lors de s’activer dans la préparation de la cuisson, posant les généreux morceaux de viandes sur le grill, attendant que le brigadier ne lui réponde, sans jugement.  

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feat. @ahn junho

Dohyun cligna des yeux. Une fois. Deux fois. Mince, il avait mal jugé la situation. Bien sûr. Le lieutenant ne l’appellerait pas comme ça sans le prévenir, pour partir faire une mission importante. Non, il l’avait appelé pour parler. Mais parler de quoi ? De ses performances au travail ? Pourquoi ne pas avoir réservé ça à leurs heures de travail ? Junho le faisait déjà suffisamment après les entraînements, où il lui disait de se ressaisir, parce que son comportement ne lui ressemblait pas (et il avait beau le savoir, il n’y arrivait pas). S’il l’amenait dans un barbecue, est-ce que c’était pour adoucir les coins ? Est-ce que c’était pour que la nouvelle qu’il allait lui apprendre lui passe mieux dans la gorge ? Est-ce qu’il allait lui dire qu’il était rétrogradé ?

Dohyun resta silencieux tandis que Junho commandait. Le serveur repartit aussi vite qu’il était arrivé, et le stress de la situation emporta le cœur du pauvre Dohyun de plus belle. Il savait qu’il avait fait quelque chose de mal et il ne pouvait pas se défendre contre ça. À part s’excuser, que pouvait-il faire ? Il ne pouvait qu’accepter la situation et vivre avec cette nouvelle pression sur les épaules, cette peur qu’il fasse pire dans le futur.

Il détourna le regard de son lieutenant, laissa traîner son regard sur ces mêmes voisins de table qu’il avait pris pour des terroristes, tout à l’heure (maintenant, ils étaient sa bouée de sauvetage). Si même son lieutenant l’invitait à un barbecue pour qu’il se confie… À quel point est-ce qu’il allait mal ? À quel point avait-il été incapable de cacher son mal-être ? Ça ne lui ressemblait pas, ça. Ça n’aurait même jamais dû arriver. Il appréciait l’intention de son lieutenant, mais il ne savait pas s’il arriverait à lui dire tout ce qu’il avait sur le cœur (il n’était pas habitué à être celui à se confier, justement).

Il se contenta de rire légèrement, regardant les mains de Junho cuire la viande. « Mon lieutenant, si vous vouliez simplement m’inviter à manger un barbecue avec vous, il n’y avait pas besoin de passer par tout ça, vous savez. Personne ne voulait manger avec vous alors vous avez été forcé de m’inviter, moi ? » La plaisanterie comme moyen de défense ; bien sûr. Mais très vite l’expression du visage se refit solennelle, parce qu’il ne voulait pas que le lieutenant ne s’offusque trop non plus (ce n’était pas son intention, de le blesser). « Vous êtes sûr que vous voulez m’entendre parler ? Et si nous parlions de choses plus joyeuses ? Regardez, tout le monde à côté rit, on devrait faire de même... » Et il sourit, comme contaminé par la joie ambiante, alors qu’il ne faisait que les imiter.

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L’expression du visage de Junho ne change pas. Pas même lorsque son subordonné essaye de lui faire une petite blague sur son côté solitaire. A la place, il croise les bras, l’air de dire « À d’autres… ». Non sérieusement, Junho était tout de même inquiet pour Dohyun. Certes leur métier leur imposait sûrement de ne pas être aussi proches, tout du moins familiers, mais c’était son devoir de s’assurer que ses hommes étaient en formes, aussi bien physiquement que mentalement. « Oui je suis sûre de vouloir entendre ça, maintenant je te prierai de bien vouloir me cracher le morceau. » répondit-il avec calme, remerciant vaguement le serveur qui revenait avec d’autres choses à grignoter comme des side dishes. Alors que Junho retournait les morceaux, il attendait que Dohyun se confie. Était-ce aussi difficile ? Ou bien était-celui qui n’inspirait pas la confiance ? Il y avait de quoi…Après tout, Junho s’était toujours montré ferme et distant avec Dohyun, mais de là à être …un tyran ? Il se posait des questions, mais les réponses viendraient d’elles-mêmes.

Il posa la pince métallique sur la table avant de tenter avec hésitation. « Est-ce que ça a un rapport avec ta fiancée ? Ou ta famille ? » Bien sûr qu’il était au courant. Après tout il était de « l’intérieur » et aussi son subordonné. Néanmoins, s’il s’agissait de problèmes d’amoureux, Junho se sentait bien incapable de donner son avis, lui qui n’avait personne dans sa vie, ni même un attrait pour quelconque personne, son propre mal-être bloquant toutes tentatives amoureuses. De plus, la fiancée de Dohyun était une membre de la famille royale, alors c’était un sujet un peu plus délicat pour le Lieutenant de par ses origines. C’était le secret à garder bien terré jusqu’à ce qu’il parte du palais…Si un jour il partait. Mais s’il y avait bien une chose dont il était certain, c’est que l’absence de Dohyun sur le terrain avait débuté après l’attentat. Etait-ce mêlé ? Junho était certes un très bon militaire, mais peut-être pas un homme bon et doté d’empathie comme on voudrait le penser. L’empathie n’était pas pour lui, ça ne l’était plus depuis un moment déjà.

Le bruit de crépitement de la viande le ramena à son occupation, coupant celle-ci en morceau pour qu’elle cuise bien, attendant toujours une réponse de Dohyun. C’était décidé, ils ne repartiraient pas d’ici sans qu’il ne crache le morceau. Hors de question que cette situation ne traîne encore pendant des semaines…Sans quoi, ce n’était pas non seulement Dohyun qui aurait des soucis, mais bien Junho avec son propre supérieur.