let the good times roll
feat @khan yeji

Attendre que les lumières principales soient éteintes pour faire le mur à la tombée de la nuit, c'est quelque chose que Suran n'avait encore jamais fait. Pourtant, à force de voir sa cousine le faire sans difficulté et l'entendre lui raconter comment chaque fois elle exploitait les failles du Palais à son avantage, c'était comme si, finalement, elle avait toujours su comment se débrouiller. Elle est un peu nerveuse lorsque l'homme posté à l'entrée du bar lui demande sa pièce d'identité. Elle s'appelle Jeong Mina, née un an plus tôt et résidant quelque part, une rue qu'elle n'a jamais visitée, dans le quartier de Dosim-gu. C'est une fausse carte d'identité. Sa première. La seule qu'elle ait jamais possédé d'ailleurs et tout ça parce que personne ne devait savoir où elle était ce soir ; plus précisément qu'elle n'était pas au palais pour répondre au strict protocole imposé par sa famille. Aussi... aussi parce qu'elle avait à peine l'âge de consommer au bar et que, majeure depuis peu, même si elle savait qu'elle ne faisait rien qui serait susceptible d'aller à l'encontre des lois de ce pays, elle s'exposait à de sacrés remontrances si l'on apprenait que la petite dernière, tout juste ses dix-huit ans passés, était allée s'offrir un petit verre, seule et loin de tout membre aguerri de la brigade royale, en compagnie de sa cousine... sa cousine, Yeji et accessoirement la fille du Roi. Seigneur, Suran, mais à quoi tu joues... Les minutes qui s'écoulent entre le moment où l'homme prend sa carte et le moment où il l'étudie scrupuleusement passent à la vitesse d'une année lumière. Elle ajuste sa frange, pas une vraie, une amovible qu'elle a mis un temps fou à fixer dans ses cheveux, et tire brièvement sur son masque noir pour laisser entrapercevoir un bref coup d'œil sur son visage ; question de vérification. C'est ok. Oh mon dieu ça veut dire qu'on va appeler la police ? que sa famille va être tenue au courant et qu'elle va finir en prison pour avoir menti et outrepassé le couvre-feu !? Au loin, elle aperçoit Yeji bien devant elle et qui la regarde l'air de lui demander de se dépêcher. Ah non ; ça veut surtout dire que tout est bon et qu'elle peut avancer... ce qu'elle fait ! mais avec trente bonnes secondes de retard. Ses longues jambes peinent à trouver le bon rythme et quand elle rejoint sa cousine, c'est en se cramponnant à elle. « Hiiiii. Je suis rentrée ! toi aussi ! on y est ! » avant d'ajuster le son de sa voix et s'en remettre à Yeji avec un regard complètement déboussolé « on fait quoi ? on va où...? » Trop d'informations pour une première fois qu'elle avait du mal à procéder clairement mais- ON Y EST OUAAAAAIS !

let the good times roll
feat @khan suran

C’est avec une habitude déconcertante ((qui ferait lever les yeux de Yesun en l’air)) que la jeune princesse prépare sa carte d’identité. Perruque blonde, regard confiant, sourire aguicheur — ce cinéma, elle l’a fait tellement de fois qu’elle ne s’en rend même plus compte. Mais de toute façon, ça ne lui sert à rien, parce que le vigile la connaît. Ce bar, c’est un peu son endroit à elle, là où elle va quand elle veut sortir du palais mais qu’elle ne veut pas forcément être dévorée par un bain de foule. C’est là qu’elle va quand elle veut passer un bon moment avec des gens qu’elle connaît déjà : Saem, son frère jumeau, Dohyun. L’évocation de ce dernier fait faner son sourire l’espace de quelques secondes ; en un instant, elle se revoit ici avec lui, ce soir-là, avant que tout ne change. Maintenant qu’elle y pense, elle n’y est pas revenue depuis. Le vigile lui dit de rentrer sans même lui demander la carte d’identité, pourtant prête dans le creux de sa main. Sourire complice, elle hoche la tête avant de se tourner vers Suran. Elle ne doute pas une seule seconde du succès de l’opération, mais elle lit avec aisance sur le visage de sa jeune cousine l’angoisse d’être recalée, reconnue. Ce spectacle la fait retomber au jour où elle est sortie pour la première fois : son coeur battait si fort dans sa cage thoracique qu’elle avait peur que ça la trahisse. Quoi qu’elle fasse, elle avait l’impression de ne pas être naturelle, au milieu de tous ces gens qui avaient leurs habitudes. Contrairement à Suran, personne ne l’avait habitué au monde extérieur, encore moins nocturne. Elle s’y était jetée, seule, avec seul son frère comme confident. Ni ses autres frères et sœur, ni Dohyun n’étaient alors au courant. Seule et en danger. Sa nostalgie est balayée au moment où elle sent les bras de Suran s’accrocher à elle, et Yeji, ou plutôt Min Seo, se met à rire. « Bien sûr qu’on y est arrivé ! s’exclame-t-elle, sûre d’elle. Autour d’elles, les gens rigolent, boivent, se draguent ou dansent sur la petite piste. Le bar est plutôt petit, jamais trop rempli, la musique pas trop forte. L’endroit idéal pour une première sortie, selon Yeji en tout cas. « Pour l’instant, on va te faire goûter à de l’alcool, ma chère Mina » Elle rigole en guidant Suran jusqu’au bar, et lui montre une carte des cocktails. « Pour commencer, je te conseille de prendre un cocktail bien sucré. Ça fera passer un peu le goût fort de l’alcool » explique-t-elle, comme si elle s’y connaissait. Yeji s’y connaît en sortie, en danse, en musique, mais pas tellement en alcool ; elle se limite toujours à un verre ou deux. Rentrer ivre serait bien trop risqué, elle ne serait pas capable d’être discrète et ce serait l’échec garanti. Sans parler des risques de gaffe si elle est saoule.