khan nara

‟Tout est en désordre. Les cheveux. Le lit. Les mots. La vie. Le cœur.
Quand il pose ses yeux sur Nara pour la première fois, il sait qu’il est foutu. Même la douceur de la belle ne peut apaiser son myocarde en feu. Des sentiments reniés. Comment faire autrement alors qu’il ne pense pas lui arriver à la cheville ? La grâce d’une telle princesse n’avait rien à faire entre ses bras et quand bien même, jamais elle n’allait être attirée par ta condition. La seule chose qui les lie, c’est la proximité de son père avec celui de la belle. Membre de la garde du frère du roi, il a toujours pris son travail très au sérieux. Seojoon, il s’en fiche, il est poussé par son paternel à suivre ses pas, mais il s’y rend en traînant des pieds, il refuse d’être le chien de garde d’une monarchie qu’il méprise. Du moins, c’est ce qu’il pense jusqu’à ce que les prunelles de la belle ne l’obsèdent. Il a même fini par la haïr de tout son être, parce qu’il n’est pas bête, Seojoon, il sait qu’il nourrit un espoir bercé d’illusions et qu’elle ne sera jamais sienne.

Et puis tout bascule. La douceur de sa peau n’est plus le fruit de son imagination. Ses joues rosies et sa timidité le poussent à s’accrocher davantage à elle. Leurs doigts qui s’entrelacent, l’espace entre les visages qui se réduisent et le goût sucré de ses lèvres lui donnent une force de vivre inimaginable. Elle. Il n’y a qu’elle. Le danger se mêle à leur idylle et ce n’est que tard dans la nuit qu’elle rejoint ses bras. Il a l’impression d’être devenu une toute autre personne Seojoon, si bien qu’il a envie de crier. Crier haut et fort à quel point il emmerde ce système, à quel point il l’aime à en crever, à quel point il voudrait s’enfuir en lui prenant la main. Rêveries cruelles. Il sait que c’est impossible, qu’il n’a rien de royal pour être légitime à rester à ses côtés. Mais elle n’a cesse de lui répéter la même chose en plongeant son regard humide dans le sien, "je ne peux pas vivre sans toi". Alors il reste, encore et toujours parce qu’il le sait, que lui non plus, il ne peut vivre sans elle.

Il se dit que la chance tourne en sa faveur quand elle lui annonce qu’ils seront bientôt libres. Sa belle doit se rendre aux États-Unis pour continuer ses études et c’est l’occasion de rêve pour l’accompagner et ne plus craindre les conséquences d’un amour interdit. Il a tout prévu dans les moindre détails et s’envole discrètement avec sa princesse, loin des regards soutenus. Bien sûr, elle n’est pas lâchée dans la nature et elle est toujours entourée pour garantir sa sécurité, mais toute cette organisation n’a rien à voir avec celle du palais et il est aisé de s’éclipser pour vivre comme s’ils n’étaient que de simples citoyens. Son sourire est encore plus éclatant qu’auparavant et il assiste à l’éclosion de sa fleur. Elle est heureuse. Il est heureux. Rien ne peut venir briser ce qu’ils vivent.

Les mois défilent, la date fatidique approche. Sur la fin de ses études, il peut lire l’inquiétude sur les traits fins de sa princesse. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’elle ne soit forcée à rentrer au pays, là où il deviendra à nouveau cet être indigne aux yeux de tous. Elle refuse d’abandonner tout ce qu’elle a construit ici, avec lui. Alors il lui propose cette idée qui lui trotte dans la tête depuis presque toujours. Et s’ils partaient ? Loin de tout. Ensemble. Elle hésite. Pèse le pour et le contre. Elle a peur. Lui aussi. Mais un événement vient tout changer et c’est sans l’ombre d’un doute qu’elle accepte. Un petit-pois dans le ventre de sa belle fait son apparition et les unit davantage l’un à l’autre. Il n’était pas forcément prêt à devenir père, mais qu’importe, tant que l’enfant ressemble à son amour.

Ils disparaissent après avoir pris l’avion pour un autre état. Ils sont libres, insouciants et bien loin de s’imaginer que la hauteur qu’ils prennent ne fera que rendre la chute plus violente. Il se sent bête. Comment a-t-il pu la mettre en danger à ce point ? Comment a-t-il pu penser qu’une princesse pouvait mettre les voiles à tout jamais ? Il se rend à cet entretien d’embauche qu’il a préparé du début à la fin. Obtenir cet emploi allait leur permettre de débuter leur vie à deux, non, à trois. Il a hâte de rejoindre sa belle qui vient de passer sa première échographie, mais c’est à une réalité cruelle qu’il fait face. « J’ai changé d’avis. C’est fini. Ne me contacte pas, je ne veux plus jamais te revoir ». Ses mots tranchants lui brisent le cœur si profondément qu’il en a le souffle coupé. Il sait, Seojoon. Ce n’est pas la signification de ces mots qui lui font peur. Il sait que ce n’est pas la volonté de sa belle, qu’elle a été retrouvée. Il a peur. Peur pour elle. Peur pour leur enfant. Il sait qu’il n’a rien à craindre le concernant, sinon, c’est lui qu’ils seraient venus trouver en premier lieu. Il se déteste pour cela, culpabilise, il préfère souffrir à sa place. Qu’on lui arrache le cœur de sa poitrine tant qu’ils ne touchent à aucun cheveu de sa belle. Mais c’est trop tard. Il ne reste plus rien de leur amour. Ni de leur enfant, arraché de force de la princesse. Il ne reste plus rien du sourire éclatant de sa bien-aimée. Il n’est plus le même. Elle n’est plus la même. Il n'arrive pas à se défaire de cette culpabilité qui le ronge chaque jour, comment allait-il pouvoir la regarder en face ? Il devrait l'oublier et passer à autre chose. Impossible. "Je ne peux pas vivre sans toi" qu'il se rappelle sans cesse à mesure que son cœur tambourine contre sa poitrine. Il ne peut se défaire de l'évidence. Elle. Il n'y a qu'elle.